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Pourquoi vous devriez partager votre salaire avec vos collègues

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    C’est moins tabou de parler de sexe que de parler d’argent en 2022. Il y a sûrement un bénéfice à parler de sexe entre amis, mais ce dont vous devriez parler avec vos collègues cette année, c’est de salaires. Pourquoi? Parce que mieux connaître la structure de rémunération de votre employeur ne peut que vous aider à obtenir une augmentation de salaire. De plus, avec l’explosion des salaires qui fait rage depuis 2020, il y a de fortes chances que les nouveaux venus dans votre entreprise soient mieux payés que vous, et vous auriez tout intérêt à exiger d’être aussi bien rémunérés. 

     

    L’information est le nerf de la guerre pour obtenir une augmentation salariale

    Sans connaître la valeur sur le marché d’un produit, il est difficile d’en tirer le meilleur prix. C’est vrai pour un revendeur de figurines sur eBay, pour gestionnaire de portefeuille qui gagne sa vie en achetant des actions en Bourse, et c’est vrai pour n’importe quel employé dont 100% des revenus proviennent de la vente d’un seul produit sur le marché du travail: lui-même. 

    Il est difficile de connaître sa valorisation sans se baser sur des comparables: des collègues effectuant un travail similaire dont vous connaissez le salaire. L’asymétrie d’information qui existe entre employeurs et employés est à l’avantage de l’employeur qui, lui, connaît non seulement le salaire de tous vos collègues, mais aussi, l’enveloppe budgétaire dont il dispose pour offrir des augmentations salariales. 

    Si un employé disposait de cette information, il pourrait demander une augmentation salariale optimale, soit une augmentation assez importante, mais pas si élevée qu’une telle position risque de nuire aux négociations. Qui plus est, l’employé qui aurait accès à toute l’information n’aurait pas de mal à justifier le bien fondé de sa demande d’augmentation. 

    Je n’ai pas trouvé d’études où des chercheurs ont réussi à convaincre des employeurs de partager de l’information salariale avec la moitié de leurs employés, pour voir laquelle des deux moitiés parviendrait à se négocier de meilleures augmentations. Par contre, les chercheurs américains Moshe A. Barach et John J. Horton se sont penchés sur l’impact du partage de l’historique salarial dans un contexte d’entrevue d’embauche

    Un groupe d’employeurs avait accès à une plateforme de recherche de candidats en ligne où les salaires antérieurs des candidats étaient affichés, tandis que l’autre avait accès à une plateforme semblable en tous points, à l’exception des salaires antérieurs. 

    Sans surprise, les candidats qui faisaient face aux employeurs n’ayant pas accès à leur historique salarial sont parvenus à négocier des salaires 9% plus élevés (par rapport à leur attente salariale) que leurs homologues qui faisaient face aux employeurs mieux informés par rapport à leurs salaires antérieurs.

     

    Le tabou du salaire est difficile à briser

    Bien qu’il n’y ait rien d’illégal à discuter de salaire avec ses collègues, le salaire demeure un tabou dans notre société, puisqu’il quantifie la contribution de chacun à la société, ou du moins, au produit intérieur brut. On a peur de partager son salaire, car s’il est trop petit par rapport à celui d’un autre, il vient prouver notre insignifiance. Et on a peur de partager son salaire s’il est élevé, car on ne veut pas susciter la jalousie. 

    Dans tous les cas, rares sont ceux qui, dans notre société obsédée par l’argent, sont prêts à révéler leur valorisation sur le marché de l’emploi. Même que 38% des participants à une étude sur le tabou salarial ont refusé de partager leur salaire, même avec la certitude que l’information resterait confidentielle… et un incitatif de 125$. 

    Les choses sont toutefois en train de changer. En effet, un sondage réalisé en 2018 aux États-Unis révélait que les milléniaux sont deux fois plus nombreux, toute proportion gardée, à discuter de salaire avec leurs collègues que les baby-boomers. Et je ne serais pas surpris que le phénomène s’accentue avec la flambée des salaires qui sévit depuis 2020. 

     

    Comment découvrir le salaire de vos collègues

    Avant d’aborder le sujet avec vos collègues, la première étape pour faire un exercice de valorisation de votre propre personne est de consulter les sites d’emplois. Attardez-vous aux offres qui affichent un salaire ou une fourchette salariale, et assurez-vous que la description de tâches correspond à ce que vous faites. Vous pouvez également visiter des sites spécialisés comme Payscale, Glassdoor et Talent.com, qui publient des estimations de salaires moyens par postes et par ville. 

    Une autre démarche, plus discrète que d’aborder le sujet directement avec vos collègues, est d’aller consulter la fiche de votre employeur sur Glassdoor, un site Web où vos collègues ont peut-être déjà partagé anonymement leurs salaires. On trouve beaucoup d’informations sur les salaires des entreprises d’une certaine taille, puisque les employés de plus grandes entreprises sont moins gênés de partager leur salaire, sachant très bien que leur patron ne saura jamais qu’ils ont partagé cette information.

    Finalement, une fois que vous avez fait vos recherches, il ne reste plus qu’à interroger vos collègues. Bien entendu, si vous avez la conviction que vous êtes mieux payés que vos collègues, leur révéler votre salaire comporte peu d’avantages pour vous, puisque vous pourriez susciter de la jalousie, ou pire, nuire à vos chances d’obtenir votre prochaine augmentation. Cela dit, vous avez beaucoup plus à gagner qu’à perdre en discutant de salaire avec vos collègues… 

    Et si ça ne plaît pas à votre employeur, rien ne vous empêche d’aller voir ailleurs. En fait, si votre seul but est d’augmenter votre rémunération, changer d’emploi le plus souvent possible – en prenant bien soin de ne pas révéler votre salaire actuel lors de la négociation salariale – pourrait être la meilleure stratégie. En effet, selon ADP Research, ceux qui ont changé d’emploi en 2021 ont vu leur salaire augmenter de 8%, tandis que ceux qui ont gardé leur emploi ont dû se contenter d’une augmentation de 5,9%. 

    Julien a co-fondé Hardbacon pour aider les Canadiens à prendre de meilleures décisions en matière d’investissement. Depuis, il a levé plus de trois millions de dollars et conclu des partenariats stratégiques avec des institutions financières de partout au pays. Avant de lancer Hardbacon, Julien a partagé sa passion pour les finances personnelles et la Bourse en tant que journaliste économique pour Les Affaires. Il a aussi passé le Cours sur le commerce des valeurs mobilières au Canada (CCVM) et, au fil des ans, a collaboré à différents médias incluant Radio-Canada, LCN et Urbania.